Auteur dramatique – Romancier – Parolier

L’écriture du théâtre est d’utilité publique, car elle sonde, elle questionne, elle explore les heurs et les malheurs de nos sociétés.
Elle est le lieu du débat, de la confrontation, la scène où s’expose les enjeux qui gouvernent nos vies, où se révèle la complexité de nos natures d’êtres humains. Ce regard des hommes et des femmes sur les hommes et les femmes nous éclaire. Il nous aide à penser et à grandir. Il doit être, par la poésie, le privilège du plus grand nombre, car la poésie laisse à chacun de nous, la liberté de la comprendre et de l’interpréter, quelle que soit l’étendue de nos connaissances.
L’écriture est pour moi un acte de jouissive indiscipline. À quoi bon l’ordre si l’on ne peut lui faire goûter un peu d’anarchie, pourquoi édicter des règles si l’on ne peut leur botter les fesses, à quoi bon nous choisir des chefs si l’on ne peut pas les faire vaciller, au moins virtuellement, sur leur piédestal.
En fait, je ne sais rien, je ne sais rien du tout, mais la joie, la joie, je la cherche, elle est là, tout près, et nous le savons si peu.

« Jamais rien d’autre. D’essayé. De raté. N’importe. Essayer encore. Rater encore. Rater mieux. » Samuel Beckett
« Il faut admettre qu’on ne sait rien, cot, cot, cot, comme disent les poules. »
Witold Gombrowicz
Tirésias jette l’éponge
Prologue
Assis sur une corniche
Bordant la toiture des cieux
Les coudes posés sur les genoux
Et le menton dans ses mains
Tirésias amarre son regard
Dans la direction d’un point qu’il ne peut voir
Mais qu’il devine Droit devant
Il soupire Hoche un rien la tête
Et reprend son monologue
Oui J’ai vu tant de choses
Auxquelles vous ne croiriez pas
J’ai sillonné les confins
Les amas de galaxies de l’Hydre et du Centaure
J’y ai vu des soleils vacillants
Provoquer l’exode de civilisations millénaires
J’ai vu des croisades interstellaires
Embraser des pans entiers de l’Univers
J’ai côtoyé les nébuleuses crépusculaires
J’ai vécu les aurores d’étoiles naissantes
J’ai chevauché la comète depuis la Machine Pneumatique
Jusqu’aux banlieues de Véga de la Lyre
J’ai caressé la Chevelure de Bérénice avant de plonger vers la Grande Ourse
J’ai vu J’ai fait tout cela Oui
Depuis la nuit des temps
Mais toujours Je retourne vers le même monde
Vers cet endroit d’où je viens
Vers ceux-là Les hommes
Ils vivent sur une petite planète
Dénommée La Terre
Infime Et bleue
Oubliée dans un recoin de la Voie lactée
Je reviens vers les hommes
Malgré leurs imbuvables prédispositions
Au sacrifice où à la domination
Cette dernière demeurant le fantasme
Qui hante le plus souvent leurs ambitions
Il y a bien longtemps
Les divinités Maudites soient-elles
M’ont obligé à les accompagner
M’ordonnant de surgir à leurs appels
Car je possède le savoir
L’Art de la magie et de la divination
Talent qui les rassure
J’ai reçu la faculté de parcourir sans fin
Le monde des morts
Comme celui des vivants
Jusqu’au jour où Lasses Sans doute
Et négligeant toute manifestation de reconnaissance
Les divinités m’ont voué aux gémonies
Me chassant D’un coup de pied aux fesses
Dans l’infini des limbes pour l’éternité
Je m’appelle Tirésias
Le croulant L’aveugle L’impotent
Mais L’esprit
Après bien des errances J’ai trouvé refuge
Dans la constellation d’Andromède
Elle m’offre son lit
J’espère le repos
Un jour Le repos
Si les Génies Si les Dieux
Dans un accès de bonté
Me libèrent de la malédiction
Mais j’en doute
Tout Génies Tout Dieux qu’ils soient
Mêmes pourrissant dans l’éther
Ils ont la dent dure
Peu m’importe
Ce qui fut Ce qui est Ce qui sera
Il est écrit
Que le temps n’a pas de fin
Et tout Tout cela se perdra dans l’oubli
Comme les larmes dans la pluie
Le vieillard se tait
Il garde un long moment
Le regard pointé vers la nuit des siècles
Un nouveau soupir soulève sa poitrine
Il redresse avec lenteur sa haute silhouette
Empoigne son bâton
Et chemine de son pas d’ancêtre
Vers la demeure d’Andromède
Traînant avec lui Sans jamais s’en défaire
Et pour l’éternité
Le lourd bagage de ses souvenirs
(à paraître aux Éditions EDERN en septembre 2025)


















MAISONS D’éDITIONS
DERNIèRES PARUTIONS

Avec ce roman solaire, Stanislas Cotton nous fait suivre une passion naissante par le menu, de la tendre complicité à la douleur du doute et de l’absence. Il le fait avec brio, d’une plume alerte et poétique, créant une forme d’indéniable enchantement qui rivalise fièrement avec la brutalité de la vie.
Thierry Detienne



Avec le style qui lui est propre – poétique et proche du conte –, Stanislas Cotton s’attaque, comme souvent, à un sujet de société. Il met à jour nos travers, notamment ici les risques de la toile. « Internet, ce marécage où il faut craindre de s’enfoncer », nous prévient-il en exergue du texte.
Emilie Gäbele